31 octobre 2009

L'éducation française vue de Suède.


Avec plus de recul sur le système d'enseignement supérieur à la française, l'efficacité suédoise me donne envie de relever quelques aspects critiquables de notre système.


D'abord, l'université nordique a bien plus d'argent. Ces moyens budgétaires se traduisent immanquablement par un exercice de recherche facilité, et en particulier pour les domaines scientifiques nécessitant de lourds investissements. Bien entendu, il faudrait également inclure les grandes écoles dans cette comparaison, mais la comparaison entre facultés reste lourde de sens.


En effet, étudier à l'université suédoise est d'un accès délicat. La candidature est de mise, parce que la sélectivité est là, contrairement à la France où la simple obtention du baccalauréat est suffisante. Cette générosité explique sans doute un taux d'échec si élevé en première année de licence. Au contraire, les promotions étudiantes suédoises sont réduites, bénéficiant donc d'un taux d'encadrement très confortable, et jouissent du prestige de leur position, pour ne pas dire de la souplesse de la formation à laquelle ils ont pu accéder. Au contraire, les études françaises à l'université sont rarement simples, d'après mon expérience personnelle. Du moins s'agissant des études de droit, il faut travailler sérieusement pour pouvoir valider une licence, et s'investir énormément au niveau master 1 pour pouvoir profiter d'un bon dossier universitaire. Dossier qui sera à peu près indispensable pour accéder à un master 2 de qualité, là où la sélectivité a repris de façon parfois féroce.


La France a fait le choix, dans les années 80 me semble-t-il, d'une massification de l'enseignement supérieur. L'intention est séduisante, mais aujourd'hui il me parait que le niveau du baccalauréat a surtout été relevé à la baisse, conduisant à peu près n'importe quel lycéen à pouvoir l'obtenir. Aux taux enchanteurs de réussite au bac succèdent, pourtant, des taux d'échecs tout aussi remarquables lors de l'entrée dans le supérieur. Il me paraitrait plus pertinent de revaloriser le baccalauréat, d'en faire quelque chose de plus difficile, lequel constituerait alors un véritable système de filtrage pour limiter le désastre des premières années.


De la même façon, la Suède a beaucoup de respect pour les filières professionnelles, lesquelles héritent surtout du dédain collectif en France. Nous préférons former des bacheliers généraux qui n'en portent que le titre plutôt que des artisans, parce que, sans doute, la culture de l'élite est là. Combien d'étudiants sélectionnent leurs filières par simple calcul rationnel élitiste, pour aller là où sont les meilleurs? Ne serait-il pas plus humain de considérer toutes les voies comme dignes? Assurément, il y a là une réalité culturelle difficile à dépasser.


Une autre conséquence liée aux choix budgétaires tient à la qualité de vie étudiante. Une forme d'allocation d'autonomie existe en Suède, de l'ordre d'environ 700 euros si j'en crois mes camarades suédois. Elle est versée à tout étudiant, indépendamment de sa situation familiale. La politique française, pourtant considérée traditionnellement comme généreuse, est éloignée de ce modèle. Les bourses sociales sont attribuées, par principe, selon les ressources des parents. Et elles n'atteignent qu'environ 450 euros à l'échelon 6. Cette différence est de taille à qui veut réussir ses études. Rectificatif: L'allocation d'autonomie n'est pas de l'ordre de 700 euros, elle est de l'ordre de 270 euros, du moins pour l'étudiant que je connais. La possibilité de recevoir dans les 450 euros de plus relève du prêt d'Etat. Merci à l'avisé commentateur!


Toutes ces différences sont assez frappantes vues d'ici. Bien sur, il peut sembler un peu spécieux de vouloir se lamenter à l'infini sur les défauts de notre système alors que, concrètement, une question majeure tient à la réalité des finances publiques si l'on veut améliorer l'état des universités. Et l'argent public ne pousse malheureusement pas sur les arbres. A tout le moins devrait-on y chercher quelque sagesse nouvelle; je trouve ce système vraiment riche de bonnes idées.

2 commentaires:

  1. Juste une précision, l'allocation d'autonomie accordée à tous les étudiants s'élève à environ 150 euros par mois je crois (à vérifier, mais c'est de cet ordre là). Pour le reste, c'est un prêt d'Etat accordé à tous les étudiants presque automatiquement, très avantageux car très peu d'intérêts, et remboursable lorsque l'étudiant entre dans la vie active, avec des échéances peu encombrantes. Il faut néanmoins réussir ses examens pour continuer à bénéficier du prêt. En fait, culturellement, les Suédois ne sont pas gênés à l'idée de s'endetter. Le fait que ce prêt soit accessible à tout le monde aux mêmes conditions permet bel et bien aux gens de faire des études supérieures quel que soit leurs origines sociale.

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  2. Merci beaucoup! J'ai vérifié la chose auprès des joyeux étudiants locaux et vous avez raison, bien que l'allocation soit de l'ordre de 270 euros et non pas 150 euros. Le reste relève effectivement du prêt d'Etat. J'ai rectifié l'article en conséquence.

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